Christophe AUDOUARD, Docteur Amiante du Rouennais

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Interview réalisée le 10 octobre 2019, mise à jour le 13/10/19

Qui êtes vous, Christophe AUDOUARD?

Christophe AUDOUARD est Docteur en chimie organique. « A la faculté de ROUEN, en 2002, j’ai soutenu ma thèse sur les « alcaloïdes du Quinquina«  . Mes recherches avaient une visée thérapeutique, dans le cadre de la lutte contre le cancer ». Après deux années de recherche « post-doc » au Royaume Uni, il candidate alors pour des postes en recherche pure, sans succès. « En 2007, un désamianteur membre de ma famille, me signale le manque d’opérateurs en diagnostics immobiliers. Je me suis alors formé et obtenu plusieurs certifications ». Mais la crise immobilière de 2008 le consacrera comme « diplômé sans boulot ».

C’est ainsi qu’il s’oriente en 2009, vers le monde du désamiantage en créant un cabinet de prélèvement d’air et en confiant les filtres à des laboratoires en place dans des régions limitrophes.
« Après quelques années d’exercices, je réalise mon rêve: créer mon propre laboratoire d’analyses ». Il investit alors dans l’acquisition de 2 MET en 2016 et les installent dans la banlieue rouennaise. Conscient d’avoir à stabiliser ses parts du marché, il limite son périmètre d’intervention aux départements situés au nord de la Loire et dans un rayon de Trois heures de Rouen. « Depuis une dizaine d’année, la situation a explosé dans ce domaine. On compte aujourd’hui quelques laboratoires en Normandie. Notre activité laboratoire est consacrée à 80% aux mesures commandées par des désamianteurs et 20% dans le cadre de diagnostics amiante avant travaux, commandés cette fois par des donneurs d’ordre professionnels, et notamment avec des gestionnaires institutionnels publics. »

AN-DIAG, Repérages et analyses des MPCA, 45 salariés.

Même si parfois AN DIAG est intervenu dans le cadre de sinistres, notamment suite à la découverte d’amiante en cours de chantier, Christophe AUDOUARD n’a jamais participé à une expertise, amiable ou judiciaire.

Le 25 septembre 2019, LUBRIZOL…

Christophe AUDOUARD est aux premières loges, professionnellement. Et c’est quelqu’un investi d’une mission de santé publique, comme il aime à le déclarer. C’est dans cet état d’esprit qu’il interviendra sur les réseaux sociaux pour chasser les « fausses nouvelles » et les posts infondés, alarmant sans motifs… « Car chez AN-DIAG, on ne confond pas le risque et le danger« . Sans préméditation, il est contacté alors par un premier « particulier » soucieux de vérifier si des résidus « tombés du ciel » avec le passage du nuage, pourraient contenir de l’amiante. 

« Je lui ai donc conseillé de faire prélever les échantillons par un huissier, en signalant le risque amiante et de nous les transmettre pour analyses. Les résultats furent positifs pour plusieurs d’entre-eux. Dans la même période, les préleveurs d’AN-DIAG interviennent pour un désamianteur chargé de « nettoyer des débris d’amiante ciment » sur des zones qui devaient être rendues accessibles en urgence pour la suite des opérations de sécurisation de l’usine. « Les prélèvements d’air ont été effectués le samedi soir et les analyses ont été réalisées dans la nuit. Car pour limiter les délais, le labo a travaillé « H24″, et nous avons pu confirmer l’absence d’émission d’amiante lors des travaux. »

AN DIAG possède 2 MET et peut, en cas de besoin, fonctionner H24 en 3*8, comme le week end du 28 & 29 septembre 2019

A la question « Est-ce à dire que le risque de présence d’amante dans le panache est insignifiant? », le Docteur en chimie rétorque: « ce que l’on sait, c’est que des prélèvements d’air réalisés plus de 24 heures après l’incendie qui a bénéficier d’un arrosage à la source ne peuvent pas fournir des résultats d’analyses représentatifs. »

Car, poursuit-il, « si l’on se réfère aux référentiels d’accréditation, un prélèvement d’air réalisé dans une ambiance humide, ne peut être probant ». Pire avoue-t-il à mi-mots, « un prélèvement d’air mené dans de telles conditions ne devrait pas afficher le logo COFRAC ».

France 3 a eu connaissance de cette première analyse d’échantillons réalisés par voie d’huissier et a tourné un sujet qui a fait un mini tabac. Depuis, France 2, et plus précisément « Envoyé Spécial », a diffusé jeudi 10 octobre un reportage consacré à l’incendie de LUBRIZOL dans lequel le gérant d’AN-DIAG répond aux interrogations du couple suivi par les journalistes.

Rouen, un écran de fumée? 

Christophe AUDOUARD a reçu l’équipe d’Elise LUCET pour « le Choix d’Envoyé Spécial« , diffusé le 10 octobre, 15 jours après l’incendie. Après une séquence où l’on suit le parcours du combat de Florence et Thierry, un couple d’habitants ayant prélevé des échantillons de « matériaux suspects » dans leur jardin, la journaliste propose de les accompagner dans un laboratoire rouennais indépendant, de l’autre coté de la ville. Au comptoir d’accueil, M. NGUYEN, directeur du laboratoire AN-DIAG, demande au couple traqueur d’amiante ce qu’il désire faire analyser. En voix off, la journaliste commente: Florence trouve enfin ici un interlocuteur pour répondre à certaines de ses question. Le lendemain, les résultats vont confirmer leurs soupçons: quatre échantillons sur cinq contiennent bel et bien de l’amiante. » Christophe AUDOUARD réagit: « Certes ce qui a été retenu est juste, mais dans l’ensemble, les rouennais que je côtoie sont déçus par le reportage qui n’insiste pas assez, selon eux, sur l’étendue de la situation et les conséquences de la pollution environnementale. Petite précision sur les échantillons montrés dans le reportage: des fibres d’amiante ont bien été observé, mais pas dans l’amas de fibres blanches et longues que l’on peut voir dans un des sachets« . Et à la question de recours potentiels en cas de procédure judiciaire, il déclare: « Nous conserverons les fractions d’échantillons brutes, non utilisées pour les premières analyses, sur une période plus longue que ce que demande l’accréditation COFRAC. Dans un cas comme celui de LUBRIZOL, nous les conserverons autant de temps qu’il le faudra, afin de permettre des contre-analyses. Mais dans l’idéal, les autorités sanitaires devraient nous donner des directives claires. Or, nous n’avons pas été conviés à la première réunion du Comité de Pilotage mis en place par le Gouvernement le jour même du reportage sur France 2. » 

https://www.francetvinfo.fr/replay-magazine/france-2/envoye-special/envoye-special-du-jeudi-10-octobre-2019_3640797.html?fbclid=IwAR3pjC9ffmMBL_AFA7Dt2PIGdYurXVdxyBE0kKgMeDCH_9ekBUGXfX7Mllo

La réunion publique du 17 octobre à la Halle aux Toiles permettra aux ONG, syndicats et associations de faire le point sur le dossier.

Quant à l’alerte du site de la DGGCRF qui aurait signalé l’existence de « démarchages frauduleux » par des diagnostiqueurs ou préleveurs déclarant être missionnés par les autorités*, le professionnel rouennais que vous êtes a-t-il été témoin de telles pratiques? « Non pas à ma connaissance, y compris dans la presse locale. Je ne sais pas comment les autorités ont eu vent de ces actions, peut-être via le n° vert mis en place?  Mais tout est possible.. le doute existe et c’est le manque de confiance des habitants dans les déclarations officielles, qui ont été mal gérées.

(*) Le 12/10/2019, sur le site officiel de la préfecture de Seine Maritime, pas de trace de ce communiqué du 9 octobre** repris abondamment par divers médias généralistes et les réseaux sociaux professionnels… http://www.seine-maritime.gouv.fr/Actualites/Mise-a-jour-Incendie-au-sein-de-l-entreprise-Lubrizol .

(**) Ajout du 12/10 à 12:10: communiqué officiel retrouvé sur le site de la DGCCRF ici: https://www.economie.gouv.fr/dgccrf/la-suite-de-lincendie-de-lusine-lubrizol-attention-aux-arnaques-de-demarchage-domicile-0

Dernière question, Christophe AUDOUARD : Que pensez vous de la création d’un corps de diagnostiqueurs, préleveurs, laboratoires, agréés par le Préfet et réquisitionnables en cas de sinistre naturel, socio-psychologique ou technologique?

Ce serait en effet une bonne initiative pour disposer dès les premières heures de moyens d’investigations adaptés à une telle situation. Et nous pourrions de notre coté, mobiliser nos personnels pour renouveler notre organisation du travail en « trois huit » le temps nécessaire à la réduction des incertitudes. Nous pourrions en effet décider de prévoir des procédures d’astreinte afin de renforcer les équipes en place par du personnel volontaire, dans un esprit de défense civile. Pour cela, il serait opportun que le Préfet dispose des capacités réglementaires pour « réquisitionner » des professionnels du secteur privé.

Ajout du 13/10/2019: l’interview publié sur le tweet de Hugo CLEMENT